Édito n°20
Libérer la parole
Non, les troubles psychiques ne sont pas l’apanage des plus « faibles ». Ils peuvent affecter les plus solides, les plus équilibrés et les plus expérimentés des secouristes. Nul n’est à l’abri. En avoir conscience, c’est déjà une force. Les SAMU, les sapeurs-pompiers et quelques associations développent depuis une vingtaine d’années leurs propres réflexions et procédures. Les mentalités évoluent, mais bien du chemin reste à parcourir. Premier rempart naturel et spontané, l’humour a toujours permis une certaine prise de recul. Mais il n’est pas toujours suffisant. Sans tomber dans l’excès inverse, il convient de réserver du temps pour la discussion post-intervention. Cette expression à chaud permet d’une part de reconstruire le déroulé de l’opération et d’en comprendre toute la dimension, d’autre part d’exprimer ses émotions. Un « défusing » reconnu par les spécialistes comme un moteur puissant de résilience. Au-delà, l’encadrement doit impérativement repérer les situations à risque afin d’organiser, si nécessaire, un débriefing en bonne et due forme. Pour les psychologues, celui-ci correspond à une intervention structurée, animée par des professionnels rompus à cet exercice, qui prend plusieurs heures et répond à des codes bien précis (lire page 34). Ces processus doivent être systématisés, en premier lieu pour une meilleure protection des professionnels du secours, mais aussi par souci d’efficacité opérationnelle.
Nicolas Lefebvre